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Les Brassicacées : généralités
Wednesday 12 May 2010, by
Les Brassicacées (ou Crucifères) ont de multiples usages alimentaires en plus d’être des plantes fourragères ou d’intérêt horticole comme les Aubrieta, les giroflées, les Iberis, les Thlaspi ou la ravenelle.
L’espèce Arabidopsis thaliana est une plante importante dans les laboratoires de recherche. Une LTP IgE-réactive, Ara t 8, a été caractérisée dans cette plante , soulignant la fréquence des LTP dans les Brassicacées.
Par exemple, les allergènes principaux des choux et choux-fleurs sont des LTP et il existe une forte suspicion que l’allergie à la moutarde soit en partie due, en zone méditerranéenne, à une sensibilisation aux LTP .
Le tableau ci-après donne quelques exemples de Brassicacées à usage alimentaire :
Genre | Espèce | Sous-espèce | Français | Anglais |
---|---|---|---|---|
Brassica | oleracea | italica | brocoli | broccoli |
capitata | chou commun | cabbage | ||
gemmifera | chou de Bruxelles | Brussels sprouts | ||
botrytis | chou romanesco | romanesco broccoli | ||
cauliflora | chou-fleur | cauliflower | ||
gongyloides | kohlrabi | kohlrabi | ||
campestris | chinensis | pak-choi | chinese cabbage | |
rapa | oleifera | navette | turnip rape | |
rapa | navet | turnip | ||
napus | oleifera | colza | rape | |
napobrassica | rutabaga | swede | ||
juncea | moutarde de Chine | oriental mustard | ||
nigra | moutarde noire | black mustard | ||
Lepidium | sativum | cresson alénois | garden cress | |
Nasturtium | officinale | cresson de fontaine | watercress | |
Sinapsis | alba | moutarde jaune | yellow mustard | |
Raphanus | sativus | radis | radish | |
Armoracia | rusticana | raifort | horseradish | |
Eruca | sativa | roquette | rocketsalad | |
Capparis | spinosa | câpre | caper |
Hormis la moutarde, la plupart de ces aliments ne sont à l’origine que de rares observations d’allergie alimentaire :
- Un cas d’anaphylaxie alimentaire avec les câpres a été rapporté (mais pas de TPO réalisé)
- Un cas d’allergie au navet, semblant s’inscrire dans un syndrome latex-aliments (bien que la patiente ait réagi au navet cuit) .
A signaler le raifort dont la racine sert de condiment mais est aussi la source d’une enzyme, la peroxydase de raifort (horseradish peroxidase, HRP) dont l’IgE-réactivité semble restreinte aux chaînes glucidiques.
De fait, le raifort n’a pas donné lieu, à notre connaissance, à des observations d’allergie alimentaire et cette glycoprotéine n’est donc qu’artificiellement IgE-réactive, et peut être utilisée comme glyco-reporter (cf. les CCD).
Les pollens des Brassicacées sont eux aussi rarement allergisants. Celui de colza a été plus étudié du fait de l’importance des surfaces cultivées et de questions environnementalistes .
Il a été décrit des cas d’allergie respiratoire vis à vis des pollens de moutarde, de choux, ou de brocoli chez des sujets professionnellement exposés .
Il a aussi été rapporté une allergie professionnelle vis à vis d’Arabidopsis .
Pollen de colza
Sont cultivés Brassica napus oleifera (colza) et Brassica rapa oleifera (navette). Les travaux publiés au sujet du pollen de colza se réfèrent à B. napus oleifera.
La pollinose au colza est rare :
- 7,1 % de TC positifs au pollen de colza parmi 4468 polliniques en Autriche . Et parmi ces TC positifs, seulement 3% ne sont pas associés à des TC positifs pour d’autres pollens
- des résultats très similaires en Allemagne : 8,8% de TC positifs (dont seulement 7% isolés)
- en France, le Réseau d’Allergo-Vigilance a recensé des prévalences de TC positifs allant de 0-4,5% dans les régions de faible culture de colza, à 9,4-15,1% dans les régions où le colza est fortement cultivé .
Ces taux de TC positifs sont d’ailleurs en partie sans relevance clinique : dans l’étude allemande, près de la moitié des TC positifs étaient négatifs en TPN .
Le peu de pollinose est probablement en relation avec le mode de pollinisation du colza et à la lourdeur des grains de pollen .
Des sujets travaillant à l’élaboration de nouvelles variétés de colza sous serres sont plus exposées et des cas d’allergie respiratoire professionnelle ont été ainsi décrits .
Les allergènes du pollen de colza ont été particulièrement étudiés en France par l’équipe de Peltre .
- En plus d’une profiline et d’une polcalcine (Bra n 2/Bra r 2) ce pollen contient une polygalacturonase, une LTP , une méthionine synthase, une protéine kinase, une berberine-bridge enzyme.
- La profiline est trouvée IgE-réactive chez 34-50 % des patients ; la polcalcine chez environ 50 % des patients .
Parallèlement à ces IgE-réactivités détectées à partir d’extraits aqueux de pollen de colza, les travaux de Peltre ont bien montré qu’il existait également des composants IgE-réactifs non-hydrosolubles, extraits seulement avec des solvants de type "TUC" (thiourée, urée, chaps) .
Ces résultats soulignent l’imperfection de nos connaissances concernant les molécules allergéniques car la quasi-totalité des études sont basées sur l’analyse d’extraits aqueux !
On peut comprendre que des tests cutanés effectués avec des produits natifs plutôt qu’un extrait aqueux donnent volontiers des réponses plus sensibles (plus "complètes" ?).
Le pollen de colza contient de nombreuses glycoprotéines IgE-réactives .
Et certaines réactions croisées avec les pollens de graminées ou avec les venins d’hyménoptères semblent dues à des CCD.
D’ailleurs le pollen de colza est parfois pris comme témoin indirect de la présence d’IgE anti-CCD, à la place ou en plus de glyco-reporters classiques comme HRP .
Les profilines sont responsables aussi de RC entre colza et d’autres pollens . De même pour la polcalcine Bra r 2 avec celle d’une graminée, Cyn d 7 . Ce qui sous-entend que le pollen de colza peut également croiser avec de nombreux autres pollens.
Mais une étude britannique portant sur 2 patients professionnellement exposés au pollen de colza n’a pu montrer de RC entre colza et diverses graminées .
Graines et huiles de colza
Les graines de colza ont de nombreux usages alimentaires, agricoles, industriels.
Pour l’alimentation humaine on utilise principalement l’huile tirée de graines de Brassica napus oleifera. Dans certains pays on utilise également Brassica rapa oleifera, la navette .
Une allergie respiratoire au colza a été observée chez des sujets manipulant les graines et/ou la farine de colza au cours de leur travail .
- Une pollinose au colza n’était pas présente dans le cas décrit par Monsalve mais une allergie alimentaire à une autre Brassicacée, la moutarde, était apparue chez ce patient postérieurement à son asthme professionnel.
Cette association moutarde-colza pourrait provenir d’une réactivité croisée entre LTP ou entre 2S albumines.
- Une observation récente montrait une allergie à l’huile de colza chez un enfant de 3 ans allergique à la moutarde .
- Mais les allergènes en cause n’ont pas été élucidés dans cette étude.
L’allergie à l’huile de colza semble exceptionnelle. De même que l’allergie respiratoire aux graines de colza ou de navet en milieu domestique (graines pour les oiseaux de volière).
Le raffinage de l’huile de colza élimine la quasi-totalité des protéines présentes dans une huile non raffinée .
En Finlande, des enfants atteints d’eczéma atopique ont été explorés pour une allergie au colza : si environ 11 % de ces enfants (par ailleurs allergiques au blé, à l’œuf, au lait de vache) avaient un test cutané positif pour les graines de colza et la plupart de ceux-ci un test de provocation labiale positif aussi, une réaction à l’huile de colza était cependant absente .
Cette étude a été par la suite étendue à des enfants Français , montrant une étroite parenté entre ces 2 graines, ainsi qu’avec la moutarde : plus des ¾ des enfants avaient un TC positif pour colza, navette et moutarde. Les tests de réactivité croisée ont montré qu’il s’agissait de 2S-albumines dans ces 3 graines.
Les allergènes des graines de colza sont principalement des "napines".
- Ce sont des protéines homologues des 2S albumines.
- On trouve Bra n 1 dans B. napus oleifera et Bra r 1 dans B. rapa oleifera.
- Ces napines sont composées d’une large variété d’isoformes. Collectivement Bra r 1 et Bra n 1 sont très proches (env. 94 % d’identité ).
Une LTP a été repérée dans B. rapa oleifera et son IgE-réactivité est probable .
Les travaux de Peltre sur des extraits aqueux et non-aqueux de graines de B. napus oleifera ont montré la présence de myrosinases, de cruciférines, et de napines IgE-réactives .
Choux, brocoli, chou-fleur
Les choux, brocoli et choux-fleur ont fait l’objet de quelques observations d’allergie alimentaire, parfois dans le cadre d’un asthme professionnel . Les réactions sont éventuellement sévères . Le Réseau d’Allergo-Vigilance a colligé 1 cas pour le chou.
Une LTP a été caractérisée, Bra o 3 dans le chou.
Une série de cas a été rapportée par Palacin en Espagne :
- le lien entre la réactivité au chou et une sensibilisation aux LTP y est clairement établi.
- On retrouve chez ces patients, en plus d’antécédents de réaction à la pêche et à diverses noix, une forte proportion de sujets allergiques à la moutarde (12/17).
- Ici la sensibilisation à l’armoise représente 16 cas/17 et les auteurs de cette étude espagnole évoquent un syndrome "armoise-moutarde-chou".
- Cette hypothèse est appuyée par des cas épars avec positivité pour l’armoise ou l’ambroisie .
- Elle cadre également avec une autre cohorte de patients Espagnols allergiques à la moutarde : sur 38 patients 37 avaient un TC positif pour l’armoise et 37 un RAST positif pour chou, chou-fleur et/ou brocoli.
Cependant, une pollinose aux composées n’est pas systématique et, comme pour d’autres aliments "de type LTP", on peut argumenter une sensibilisation aux LTP par la pêche, favorisant secondairement une réactivité à l’armoise (cf. châtaigne).
De fait, la plupart des observations d’allergie aux choux et au chou-fleur sont d’origine espagnole et peuvent faire partie du syndrome LTP pêche-aliments rencontré en régions méditerranéennes (voire raisin-aliments en Grèce ).
L’allergie au chou-fleur s’accompagne parfois de réactions pour le chou , mais le nombre d’observations d’allergie au chou-fleur est trop faible pour conclure.
Une cohorte de 6 patients avec allergie au chou cru mais pas cuit a été rapportée récemment : un TPO ouvert avec le chou cuit confirmait l’anamnèse chez ces patients Grecs. Pour les auteurs de ce travail, cette disparition de l’allergénicité après cuisson réfuterait une cause LTP. Cette hypothèse mériterait cependant d’être vérifiée car les LTP du chou peuvent être éluées dans l’eau de cuisson : ces protéines sont présentes plutôt en surface des feuilles .