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Les Cucurbitacées
mercredi 30 juin 2010, par
Parmi les Cucurbitacées, le melon domine la scène.
C’est un des principaux responsables d’allergie alimentaire en Espagne.
Des réactions cliniques avec d’autres Cucurbitacées ont été rapportées : courgette , concombre , citrouille , potiron avec parfois des réactions à plus d’une Cucurbitacée .
Un cas d’allergie respiratoire à la courgette a été décrit qui n’était pas accompagné d’allergie alimentaire pour la courgette.
L’allergénicité n’est pas limitée à la pulpe : des tests natifs positifs ont aussi été relevés avec les pépins de melon et avec la partie du fruit entourant les pépins . Et une allergie de contact avec la peau de melon, accompagnée d’un syndrome oral avec la pulpe, a également été rapportée .
Par ailleurs, la courgette cuite conserve son allergénicité .
Il en est de même avec les graines de citrouille ou de potiron consommées grillées en « snack » : 3 cas d’anaphylaxie à ces graines ont été rapportés (sans allergie au melon) . Des TC natifs positifs étaient vus pour les graines crues de diverses Cucurbitacées.
La chayote (Sechium edule) est aussi une Cucurbitacée dont le fruit est consommé en régions tropicales : c’est la christophine ou chouchou. Il a été rapporté des cas d’anaphylaxie à ce légume .
Les allergènes des Cucurbitacées
Des profilines ont été caractérisées dans le melon, la pastèque, la courgette, le concombre, le potiron.
- Des auteurs ayant constaté un défaut inattendu de réactivité croisée entre profilines de certains melons ou avec la profiline de pastèque en ont conclu que de fines différences de séquence se traduisaient par des modifications sur des épitopes conformationnels aptes à produire des réactivités différentes .
- La profiline de melon (Cuc m 2) n’est pas stable en digestion gastrique mais résiste à 100°C 15 min . Un extrait melon résiste 15 min en milieu salivaire .
Une ascorbate oxydase de 62 kDa est IgE-réactive dans la courgette.
- Cette enzyme est glycosylée et peut servir de glycoreporter (cf. CCD).
- Elle pourrait être le support de la réactivité purement CCD notée par Vieths chez un patient allergique à la courgette.
D’autres Cucurbitacées comportent une réactivité de type CCD
.
Une sérine protéase de 66 kDa, appelée cucumisine, est un allergène important dans le melon (Cuc m 1).
- Elle est glycosylée.
- Elle apparaît en SDS-PAGE sous plusieurs kDa entre 26 et 66 kDa, ce qui est un problème courant dans l’interprétation des blots.
- Cuesta-Herranz montre que la cucumisine a plus ou moins des homologues dans le soja, la tomate, l’aulne, etc… et suggère aussi un rôle pour cet allergène dans des réactivités croisées melon-latex . Mais les preuves sur ce point font défaut.
Un allergène s’apparentant aux protéines de défense végétale PR-1 a été caractérisé .
- Cet allergène de 16 kDa nommé Cuc m 3 n’a été que partiellement séquencé et l’absence de glycosylation n’est pas affirmée.
- Des protéines PR-1 sont présentes dans de nombreux végétaux (tomate, raisin, banane, maïs, bouleau…) sans que leur IgE-réactivité ou leur présence dans la partie de la plante qui est allergisante (ex. le pollen pour le bouleau) ne soit pour le moment attestée.
- Une PR-1 est connue aussi dans le concombre et pourrait, du fait de la proximité taxonomique, représenter une cause de réactivité croisée avec Cuc m 3 du melon.
- D’autres protéines classées en PR-1 sont, elles, IgE-réactives : Cyn d 24 dans le pollen de Cynodon dactylon et Art v 2 dans le pollen d’armoise.
- Ces protéines végétales font partie d’une famille comprenant aussi des allergènes de venins d’Hyménoptères (vespides, fourmis), dits "Ag5" : cette famille est dénommée V5/Tpx-1/Sc7 ou CRISP (pour cysteine-rich secretory proteins).
La présence d’une isoflavone-réductase IgE-réactive dans la courgette est suggérée par une réaction croisée avec rPyr c 5 . Pour le melon, la réaction croisée avec rPyr c 5 était plus faible.
L’inhibition de rHev b 6.01 par la courgette tendrait à montrer la présence d’une chitinase de classe 1, IgE-réactive, dans la courgette.
Une protéine dite MLP (pour major latex protein) est exprimée dans le melon avec le mûrissement .
- Des MLP sont présentes dans de nombreux végétaux (latex de pavot, poivron, fraise, etc…) et appartiennent à un groupe de protéines possédant un domaine "START".
Enfin, une triose-phosphate isomérase (28 kDa) et une malate deshydrogénase (36 kDa) se sont récemment ajoutées à la liste des protéines IgE-réactives du melon . Ces 2 enzymes, instables sous l’action de la pepsine, étaient positives en blot chez 96% et 78% des patients espagnols testés (n=23).
Les réactivités croisées des Cucurbitacées et la question du latex
Les réactions croisées sont fréquentes entre différentes Cucurbitacées.
Le rôle des profilines est attesté in vitro, rBet v 2 inhibant melon, courgette et le melon inhibant la profiline de chénopode.
Des réactivités CCD sont possibles avec les Cucurbitacées.
- Elles pourraient expliquer l’inhibition d’extraits globaux par le latex (ex. courgette ), ou une réactivité croisée réciproque entre melon et latex .
Cependant, à la lumière des observations montrant chez les polliniques la négativité du latex en TC malgré un positivité in vitro pour Hev b 8 (profiline) , on peut s’interroger sur l’origine des TC positifs pour le latex chez des patients recrutés sur la base d’une allergie au melon.
Les indices permettant de ranger le melon (et d’autres Cucurbitacées) dans le syndrome latex-aliments sont ténus.
- Les séries Espagnoles citées plus haut comprenaient des sujets multi-polliniques chez qui, majoritairement, la pollinose avait débuté avant l’allergie au melon.
- On est donc en droit de suspecter fortement une association pollens-melon (profilines, et peut-être PR-1 ?) au sein de laquelle d’autres réactivités sont apparues chez ces patients particulièrement atopiques. Le latex ne serait là qu’un épiphénomène.
- Les observations espagnoles contrastent d’ailleurs avec les études d’allergies alimentaires effectuées ailleurs en Europe : la prévalence de TC latex positifs sur recrutement pollens ou aliments y est notablement plus faible.
Globalement, la sensibilisation pour des profilines paraît être une cause nettement plus probante que le latex pour une allergie au melon .
- Dans une étude italienne basée sur une mono-réactivité à Bet v 2, 56 % des sujets avaient une histoire positive pour le melon .
La situation pourrait être un peu différente pour la courgette :
- il a été montré une inhibition de rHev b 6.01 par la courgette
- et, à l’occasion d’une observation d’anaphylaxie à la courgette chez une patiente allergique au latex , il semble que la relation latex-courgette ait pour support la peau de la courgette
- En effet, le blot pulpe de courgette était négatif tandis que le blot peau de courgette présentait une bande 30-32 kDa qui était inhibée par le latex. La patiente étant positive pour Hev b 6, on peut donc supposer une réactivité croisée latex-peau de courgette due à une chitinase.
Pollinose et allergie aux Cucurbitacées
Une pollinose est présente dans la plupart des observations d’allergie au melon , à la courgette , au concombre , etc…
Et il n’est pas rare que les patients présentent une polyallergie alimentaire, en plus des Cucurbitacées : avocat, banane, etc.. .
Il est classique de voir cités le plantain et l’ambroisie comme pollens associés à une allergie au melon.
- La question est de savoir si ces pollens ont des allergènes particuliers capables de générer une allergie croisée spécifique.
- Dans le cas du plantain , les tests in vitro orientent vers des causes classiques de réactivité (profilines, CCD), non spécifiques au plantain.
- Il en est de même pour melon, pastèque et ambroisie , l’allergie alimentaire n’ayant par ailleurs pas été démontrée dans une étude (enquête téléphonique !) , tandis que la réactivité croisée n’était pas démontrée dans une autre étude … basée sur des anticorps de lapin .
La responsabilité des profilines est également suspectée dans le cas d’une sensibilisation au pollen de genévrier associée à des réactions alimentaires au concombre ou à la pastèque aux USA .
Cucurbitacées et syndrome LTP
Un grand nombre d’études concernant le melon ou d’autres Cucurbitacées provenant d’Espagne, il n’est pas surprenant de trouver au sein des cohortes étudiées une fréquence notable d’histoires cliniques positives pour des aliments LTP comme la pêche.
Selon Asero, les Cucurbitacées semblent exclues du syndrome LTP du fait de l’absence de cas réagissant avec le melon parmi des sujets exclusivement sensibilisés aux LTP .
L’implication des profilines est au contraire fortement suspectée chez des patients polliniques présentant également des réactions avec la tomate, la banane, la carotte, l’orange .
Les réactions systémiques sont rares avec le melon (3 cas/787 dans le RAV), ce qui oriente aussi vers les profilines plutôt que les LTP . Par exemple, à Madrid, il a été relevé 71% de patients positifs pour les profilines en cas de syndrome oral avec le melon .
Les profilines sont aussi en jeu pour nombre de réactions à la courgette , et dans le cas de la pastèque (odd-ratio de 7,8 en faveur d’une réactivité profilinique) .
Dans la mesure où des test in vitro avec des allergènes purifiés/recombinants ne sont pas disponibles, l’exploration d’une allergie aux Cucurbitacées peut faire appel aux tests cutanés distribués par ALK-Abello et spécifiques d’une profiline (Pho d 2), de Mal d 3 (LTP) ou de Mal d 1 (PR-10).
C’est la démarche suivie par Asero qui a étudié 80 patients présentant un syndrome oral avec divers aliments végétaux (Milan Italie) :
- La figure ci-dessous montre la répartition des TC positifs, chez les patients mono-positifs en profiline, en PR-10 ou en LTP, selon l’aliment en cause :
On voit que melon et pastèque sont des aliments majoritairement associés à une réactivité pour les profilines.
Mais d’autres allergènes, comme Cuc m 1 ou Cuc m 3 s’agissant du melon, ne pourront être testés et les TC (natifs) ainsi que le CAP melon (malgré ses limites et les CCD) devront donc encore compléter la démarche diagnostique.