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Les agrumes
mercredi 22 septembre 2010, par
L’intérêt pour les fruits des Rutacées s’est révélé très récemment avec la caractérisation d’allergènes dans l’orange.
Plusieurs études depuis 2003, principalement espagnoles, ont exploré des cas d’allergie à l’orange , à la mandarine ou aux agrumes .
Le citron a fait l’objet de quelques observations , conjointement à une allergie à l’orange, de même que la mandarine . Le jus d’orange est impliqué aussi .
Pour le pamplemousse, seul un cas (mal documenté) a été rapporté .
L’allergie consiste le plus souvent en un syndrome oral.
Un cas d’allergie sévère à l’orange a été relevé dans le Réseau d’Allergo-Vigilance (mai 2010, 900 déclarations). Des réactions anaphylactiques ont aussi été publiées qui, pour l’une d’entre elles, était associée à l’exercice .
Fait peu courant, l’allergie était confirmée par TPO dans beaucoup de ces travaux concernant les agrumes.
La réalité de l’allergie aux agrumes et, particulièrement à l’orange, est donc incontestable. Les cas décrits hors de l’Espagne sont cependant rares (Belgique 1 cas, Japon 1 cas, Corée 1 cas).
Une autre caractéristique de l’allergie à l’orange est la fréquence des cas pédiatriques .
Un cas d’anaphylaxie par contact avec un savon parfumé aux pépins d’agrumes a été récemment rapporté . Un autre cas d’anaphylaxie impliquant les pépins de mandarine (mais pas la pulpe) a été décrit .
Il semble que les pépins d’orange, de citron et de pamplemousse, qui croisent entre eux, possèdent des LTP IgE-réactives.
Chez des sujets professionnellement exposés aux orangers une pollinose peut survenir. Elle ne semble pas s’accompagner d’une allergie alimentaire à l’orange .
Les allergènes des fruits des Rutacées
Une LTP a été caractérisée dans l’orange (Cit s 3), le citron (Cit I 3) et la mandarine (Cit r 3).
- Pour l’orange, la LTP est trouvée dans la peau à des concentrations très supérieures à celles dans la pulpe , cette dernière ayant même été décrite comme dénuée de LTP .
Les LTP d’orange et de citron croisent avec Pru p 3, la LTP de pêche et la responsabilité d’une allergie à l’orange consécutive à une sensibilisation à la pêche est suggérée par la dissymétrie de cette réaction croisée en faveur de Pru p 3 .
- Par ailleurs, dans la cohorte d’Ahrazem , les 7 patients positifs pour rCit s 3 étaient tous positifs pour rPru p 3, alors que rPru p 3 était positif chez 3 patients négatifs pour rCit s 3.
Une profiline (Cit s 2) a été caractérisée dans l’orange.
- Elle pourrait avoir une répartition inverse de celle de la LTP, Cit s 2 n’inhibant que partiellement la réactivité d’un extrait de peau d’orange .
- La réactivité profilinique est très majoritaire chez les allergiques à l’orange : 78 % de sujets Cit s 2 positifs, dont 20 à 50 % de mono-Cit s 2 , et 4 enfants sur 6 positifs pour rBet v 2 dans une autre étude .
- Il arrive cependant que la réactivité pour une profiline soit absente et ces cas sont souvent positifs en LTP avec un tableau clinique volontiers sévère.
L’orange contient un allergène d’une famille jusqu’à présent peu répandue parmi les allergènes connus : Cit s 1 est une germine-like de 23 kDa.
- Les germines ont un rôle de défense dans les végétaux et se rangent dans la superfamille des cupines.
- Cit s 1 est glycosylé avec une chaîne de type MMXF ou GnMXF . L’IgE-réactivité de cette chaîne glucidique pourrait rendre compte d’une partie des CCD de l’orange, certains auteurs pensant même que l’IgE-réactivité de Cit s 1 est principalement glucidique .
- Cependant, Crespo observe que Cit s 1 est modérément inhibé par la chaîne MUXF (broméline).
- On trouve Cit s 1 dans la peau et dans la pulpe .
Une isoflavone réductase (IFR) de 35 kDa, repérée par Karamloo , est positive chez 5 patients allergiques à l’orange sur un total de 82 .
Un travail autrichien, non confirmé pour l’instant, a suggéré une chitinase de 25 kDa et une glyoxalase de 33 kDa .
- Un cas d’anaphylaxie à l’orange (jus) et à la mandarine a été décrit chez un sujet allergique au latex , mais l’association latex-orange n’a pas été prouvée (pas de test d’inhibition avec des recombinants).
A noter qu’en blot (n = 5 sujets) les profils de réactivité sont similaires avec des jus d’orange du commerce .
Allergie aux agrumes, pollinose, profilines et LTP
Une pollinose est associée dans plus des 2/3 de cas d’allergie à l’orange.
- elle concerne principalement les graminées et l’olivier (Espagne) .
- elle génère une large réactivité profilinique qui suscite des histoires cliniques positives pour divers aliments d’origine végétale, tableaux au sein desquels l’orange est toutefois minoritaire (au mieux 10% des patients recrutés pour une autre allergie, comme la banane, le melon, la tomate, le kiwi, etc…
- enfin, dans les séries où le recrutement était motivé par une allergie à l’orange, entre les 2/3 et les 3/4 des patients étaient positifs pour les profilines (notamment Cit s 2, celle d’orange) .
Asero a réalisé plusieurs études visant à différencier l’origine moléculaire des réactions à des aliments végétaux. Ces travaux ont montré :
- que chez des patients mono-positifs pour rBet v 2 (profiline), une histoire clinique d’allergie à l’orange était beaucoup plus fréquente que chez ceux qui étaient mono-rBet v 1 (PR-10) : 33% vs 4% . Cet écart était confirmé en utilisant non plus des tests in vitro mais des TC sélectifs pour les profilines ou les PR-10
- et que chez les patients mono-LTP une allergie à l’orange était très rare, voire absente .
Dans l’étude Vegetalia menée en Espagne, un odd-ratio de 7,5 pour une réactivité vis à vis des profilines était noté en cas d’allergie à l’orange .
Au total, l’orange est donc nettement un fruit à « tendance profiline » plus que LTP.
La place prise par l’allergène Cit s 1 (germine-like) n’est peut-être pas négligeable, mais n’a pas encore été clairement évaluée. Par exemple, dans la série rapportée par Crespo , 66% des patients étaient positifs pour Cit s 1, mais dans le même temps 78% l’étaient pour la profiline Cit s 2.
L’approche moléculaire se justifie donc pour l’allergie à l’orange : différencier une origine PR-10 ou profiline ou LTP, etc… D’autant que les tests effectués avec des extraits ont leurs limites :
- beaucoup de TC négatifs non confirmés en TPO, particulièrement avec les extraits commerciaux
- et s’agissant des tests in vitro, l’orange est susceptible de montrer une réactivité de type CCD. Celle-ci est notamment concentrée en blot dans des zones de masse > 30 kDa (68 % des cas ), inhibables par l’ivraie .