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Le raisin (et ses dérivés)
Monday 20 September 2010, by
La littérature allergologique concernant le raisin n’a pris un essor que récemment.
Des séries de patients allergiques au raisin ont été publiées notamment en Espagne , en Italie , et en Grèce .
Mais l’allergie au raisin n’est pas réservée aux régions méditerranéennes : quelques cas ont été décrits en France en Allemagne , ou aux Etats Unis .
Elle concerne aussi bien les adultes que les enfants.
Des observations motivées parfois par des réactions anaphylactiques , voire d’anaphylaxie alimentaire associée à l’effort .
En France, le Réseau d’Allergo-Vigilance a colligé 2 cas d’allergie sévère au raisin parmi 900 cas déclarés en mai 2010 (cf. le tableau des statistiques RAV).
Quels sont les allergènes dans le raisin ?
En dehors de la LTP, Vit v 1, on a montré la présence d’une profiline, d’une chitinase de classe 4 et d’une thaumatine-like . Ces deux dernières sont abondantes dans le raisin mûr, même si les taux varient avec les cépages et les attaques subies par la vigne (ce sont des PR-protéines) .
Récemment on a aussi confirmé l’IgE-réactivité d’une autre PR-protéine, une β1,3 glucanase, d’une expansine et d’une PGIP (inhibiteur de polygalacturonase) .
Diaz-Perales avait supposé également l’IgE-réactivité d’une chitinase de classe 1 .
D’autres allergènes sont probables car on dénombre plus de 300 protéines différentes dans le raisin, certaines en quantités notables comme une déhydrine ou une invertase .
Les LTP semblent avoir une forte implication des LTP dans l’allergie au raisin:
- de nombreux patients sont aussi allergiques aux fruits des Rosacées
- ou présentent une réactivité en faveur des LTP
- ou montrent une réactivité croisée possible entre le raisin et des LTP .
Mais dans certains environnements la prévalence de réactions cliniques avec le raisin est faible comparativement à d’autres aliments typiques des LTP comme la pêche ou la noisette. Ainsi, Asero à Milan ne relève que 3 cas avec une histoire clinique positive pour le raisin parmi 49 sujets mono-LTP .
De même, le pourcentage des allergies à des aliments-LTP chez des allergiques au raisin n’est pas toujours très élevé:
On pourrait être en présence
- soit d’une réactivité croisée incomplète entre les LTP de pêche et de raisin
- soit d’une relevance clinique pour d’autres allergènes que Vit v 1 dans le raisin :
- par exemple, une étude de patients explorés pour une allergie au melon, aliment à priori non-LTP , montre 58 % de tests cutanés positifs pour le raisin .
- et si cela évoque une profiline, une autre étude ne relève aucun cas d’allergie au raisin parmi 27 patients Espagnols allergiques à l’orange , un fruit pourtant nettement profilinique.
Un rôle pour les thaumatine-like ?
Le raisin contient des protéines solubles qui s’accumulent avec la maturation du grain .
- Il s’agit principalement de chitinases et de protéines thaumatine-like (PThL).
- Ces protéines sont présentes aussi après vinification et compromettent la stabilité du vin sur le plan de sa clarté .
La conservation du raisin par réfrigération avant commercialisation a tendance à élever les taux de β1,3 glucanase et de chitinase classe 1. Cette augmentation est ralentie pour le raisin conservé sous atmosphère à 20 % de CO2 .
Si la β1,3 glucanase est instable en digestion gastrique , la PThL ainsi que la LTP résistent très bien . On devrait donc s’attendre à constater des allergies au raisin dues à des PThL.
D’autant que si la PThL de raisin a une moyenne homologie avec la PThL de pomme Mal d 2 (42 % d’identité) elle est très proche des PThL de pollens de Cupressacées (93 % avec Cup a3 ), arbres qui sont très présents en milieu méditerranéen.
L’éventuelle relation entre pollinose et allergie au raisin mériterait donc d’être explorée. Pour l’instant, l’allergie au raisin est considérée comme faisant partie du "syndrome LTP", c’est-à-dire d’un cadre où la sensibilisation aux aliments s’opère directement, souvent sans l’aide de pollens.
Le raisin initiateur du syndrome LTP ?
Pour Pastorello (en Italie) c’est la sensibilisation à la pêche qui induit la réactivité au raisin . Mais pour Vassilopoulou (Grêce) c’est le raisin qui est l’initiateur des réactivités à d’autres aliments-LTP . Dans cette étude, il a été montré que :
- l’allergie alimentaire avait débuté par le raisin chez 23/49 patients ;
- et que l’ordre d’apparition des allergies alimentaires, après celle pour le raisin, était (en moyenne) le suivant : arachide, noisette, noix, amande et pistache avant pêche ou pomme.
De même, dans la cohorte de 11 patients Grecs avec allergie au raisin, seulement 2 rapportaient des réactions à l’ingestion de pêches .
La place de l’allergie au raisin semble donc varier avec les pays. Elle doit dépendre, entre autres, des habitudes alimentaires et de l’environnement allergénique.
Existe-t-il un risque particulier pour les sujets sensibilisés au latex ?
Il semble que non car la prévalence d’une allergie au latex concurremment à une allergie au raisin reste de l’ordre de la coïncidence .
On pourrait s’étonner du peu de lien avec le latex sachant que le raisin (comme le vin) contient des chitinases possédant un domaine hévéine (chitinase de classe 4 et de classe 1).
Il est possible que le domaine hévéine de ces chitinases ait une homologie trop faible avec l’hévéine. Cela est le cas pour la chitinase de classe 4 (cf. chitinases).
Ce peu de lien latex-raisin est étonnant aussi quand on sait que les chitinases s’accumulent avec le mûrissement des grains. Si l’on peut supposer que la LTP du raisin soit concentrée dans la peau du fruit, comme pour la pêche, l’allergénicité devrait s’exprimer avec l’ingestion du fruit naturel dont la pulpe contient les chitinases.
Cela pourrait être différent avec les jus de raisin dont la fabrication passe par un stade de chauffage et donc par une instabilité probable des chitinases.
Les jus de raisin peuvent encore contenir des LTP qui, elles, sont thermostables. De fait, plusieurs observations indiquent que les patients réagissent au jus de raisin en plus du raisin frais .
Il en est de même pour les raisins secs et pour le vinaigre de vin .
Des réactions cliniques ont également été rapportées pour les feuilles de vigne et le pollen de vigne chez certains patients.
Le cas du vin
Plus nombreuses sont les observations de réactions d’allergie IgE-médiée avec le vin chez des sujets allergiques au raisin . Une anaphylaxie est possible.
Pastorello estime que l’allergie au vin se rencontre principalement avec les vins "nouveaux" ou bus jeunes, lesquels contiendraient plus de chitinase de classe 4 .
Mais certains auteurs évoquent une autre hypothèse pour les réactions vis à vis des seuls vins jeunes mais pas avec des vins vieillis ou commercialisés : la présence d’allergènes issus d’Hyménoptères se retrouvant dans la cuvaison .
Il ne semble pas y avoir de différence entre le vin rouge et le vin blanc, bien que le contact avec la peau du raisin, caractéristique des vins traités en rouge, laisse supposer une présence plus élevée de LTP dans les vins rouges. La thaumatine-like et la chitinase classe 4 du raisin se retrouvent également présentes dans le vin.
Mise à part une exceptionnelle allergie à l’éthanol lui-même , les réactions IgE-médiées pour le vin font donc avant tout partie d’une association avec une allergie au raisin. Le rôle des LTP semble plausible. Mais celui des chitinases et thaumatines-like mériterait d’être étudié .
Dans les cas décrits d’allergie au vin il ne s’agit pas d’intolérance aux sulfites, ni de richesse en histamine dont on sait qu’elle ne joue pas sur la réactivité clinique .
Pour l’affinage et la clarification des vins divers agents sont utilisés afin de diminuer les tannins (polyphénols). Le blanc d’œuf pour les vins rouges, l’isinglass (collagène de poisson) ou les caséinates pour les autres vins (de même que pour le cidre). Les doses sont : caséinates < 1 mg/ml, isinglass < 0,05 mg/ml, blanc d’œuf (avec ou sans lysozyme) < 0,1 mg/ml. S’il peut subsister parfois des traces d’agents d’affinage, il n’a pu être montré une allergénicité clinique avec des vins ainsi traités (cf. Œufs et Gélatines).
Accessoirement, le vin, comme d’autres boissons alcoolisées absorbées en quantités excessives, peut influencer le statut IgE des patients et, notamment, générer des IgE anti-CCD (cf. Les CCD).