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Les viandes
jeudi 11 mars 2010, par
Les cas d’allergie alimentaire aux viandes de mammifères ou aux viandes de volailles restent rares comparativement à l’ubiquité de ces produits dans l’alimentation occidentale. Ils sont cependant importants à connaître car ils s’inscrivent fréquemment dans le cadre de sensibilisations aussi courantes que l’allergie aux animaux domestiques ou l’allergie au lait de vache.
Allergies aux viandes
Allergie aux viandes de mammifères
En 2002, selon les statistiques du CICBAA, 2,6 % des allergies alimentaires chez l’enfant et 2,9 % chez l’adulte concernaient les viandes .
Plus spécifiquement, les 14 cas d’allergie à des viandes de mammifères colligés à Nancy (sur 1037 allergies alimentaires) se répartissaient ainsi :
- Enfants : 4 cas avec le bœuf, 2 porc et bœuf, 2 porc
- Adultes : 2 porc et lapin, 1 porc, 1 bœuf (et lait de vache)
Rancé a estimé à 0,6 % les allergies à la viande de porc et à 1,5 % celles pour le bœuf parmi les allergies alimentaires de l’enfant .
Moneret-Vautrin estime que chez l’enfant c’est surtout la viande de bœuf qui est concernée, avec souvent une tolérance au bœuf bien cuit et une IgE-réactivité vis-à-vis de la bovalbumine . Fiocchi ajoute que ce cadre, souvent associé à une APLV, évolue habituellement vers l’acquisition d’une tolérance .
Sur 900 allergies alimentaires sévères déclarées au Réseau d’Allergo-Vigilance (mai 2010), seulement 5 concernaient les viandes (3 porc, 1 bœuf, 1 sanglier). Pas d’accident sévère avec les viandes de mouton, de lapin, etc.…
Ces données pour les viandes contrastent avec celles pour certains abats comme les rognons, où 15 cas étaient observés dans le Réseau.
Comme le souligne Drouet, il est important, notamment chez l’adulte, de rechercher des cofacteurs déclenchants .
On connaît des anaphylaxies alimentaires induites pas l’effort : par exemple pour le porc , ou le poulet .
Pour Fiocchi, la moitié des patients allergiques au bœuf le sont également pour le mouton/agneau.
Et Drouet estime à 77 % les patients allergiques au porc qui sont également "sensibilisés" au bœuf.
Il ne semble pas y avoir de règle précise cependant pour ces associations : le tableau ci-après montre quelques exemples de combinaisons vues en clinique :
Nb de patients | bœuf / veau | mouton / agneau | porc | lapin | cheval | Référence |
---|---|---|---|---|---|---|
6 | 3 | 6 | 1 | |||
2 | 2 | 1 | 1 | 1 | ||
1 | 0 | 0 | 1 | |||
1 | 1 | 1 | 0 | |||
2 | 0 | 0 | 2 | |||
2 | 2 | 2 | 2 | |||
1 | 0 | 1 | ||||
1 | 1 | 1 | 1 | |||
1 | 1 | 1 | 1 | 1 |
L’allergène le plus apte à générer une réactivité à plus d’une viande semble être l’albumine : plusieurs travaux ont montré que la bovalbumine pouvait inhiber les viandes de mouton, de porc, de lapin ou de cerf .
L’allergie aux viandes de mammifères n’est pas limitée aux mammifères terrestres : un cas d’allergie à la viande de baleine et à la viande de phoque a été rapporté chez un garçon Eskimo .
Allergie aux viandes de volaille
L’allergie aux viandes de volaille semble rare :
- parmi les 900 observations du Réseau d’Allergo-Vigilance (mai 2010), 4 concernaient dinde ou pintade et deux le poulet
- sur 1412 allergies alimentaires du CICBAA, une seule concernait la viande de canard. Et chez des enfants, les statistiques relevées à Nancy donnent 7 cas d’allergie prouvée pour le poulet (dont un avec la dinde également) sur 1037 allergies alimentaires .
- diverses études américaines ont estimé à 1,3-5% la fréquence d’une allergie à la viande de volaille chez des enfants avec eczéma atopique et/ou allergie alimentaire (cité par ).
Le poulet est plus souvent cité que d’autres volailles, mais cela est peut-être en rapport avec sa large consommation.
Lorsqu’un sujet est allergique à une viande de volaille, il n’est pas rare qu’il soit allergique à d’autres volailles : la dinde, la caille, le canard et aussi des oiseaux sauvages (faisan, perdrix).
Une réactivité a aussi été notée pour des viandes jusqu’alors non consommées par le patient, comme l’autruche .
L’allergie aux viandes de volailles a principalement été rapportée chez l’adulte jeune , mais on connaît aussi des cas pédiatriques .
Les albumines sériques sont suspectées responsables de cette allergie alimentaire, mais des profils variés selon les patients ont été rencontrés avec en immunoblot des réactivités autres que celle correspondant aux albumines . C’est le cas dans l’observation d’une allergie au poulet où une hémoglobine était en jeu .
Allergènes des viandes
Allergènes des viandes de mammifères
Certaines protéines sont d’origine sérique (albumine, IgG), d’autres d’origine musculaire : soit des myofibrilles (myosine, actine, tropomyosine, troponine), soit du sarcoplasme (myoglobine), soit du tissu conjonctif (collagène, élastine) .
L’albumine joue un rôle majeur parmi les allergènes des viandes de mammifères (cf. Albumines).
Des réactions croisées sont possibles entre l’albumine de bœuf (bovalbumine) et les albumines de porc, de mouton, de lait de vache, etc.… . On connaît des albumines IgE-réactives dans la viande de cerf et celle de daim. L’albumine est l’acteur principal du syndrome "porc-chat".
L’albumine ovine est souvent positive en même temps que l’albumine bovine, y compris en TPODA , mais cela ne se traduit pas en une expression clinique systématique bœuf/mouton.
L’immunoglobuline G intervient dans l’allergie aux viandes chez certains patients .
Ayuso estime même que la positivité en blot pour la fraction 160 kD permet de détecter les sujets qui sont symptomatiques pour le bœuf . Pour cet allergène aussi la réactivité dans le bœuf est souvent retrouvée dans le mouton . Le sérum de porc contient des gamma globulines IgE-réactives.
Les autres allergènes ont une place mal définie et probablement mineure :
- l’actine est bien IgE réactive dans le bœuf mais son allergénicité in vivo reste à démontrer . De même pour la transferrine.
- la myoglobine (17 kDa) a été évoquée dans un cas d’allergie au bœuf
- la tropomyosine n’est qu’exceptionnellement positive en blot (porc) et ne peut être considérée comme un allergène dans la viande, ni un allergène croisant avec les tropomyosines des invertébrés (crustacés, acariens, etc.….)
- le collagène a montré son allergénicité sous la forme des gélatines . N’étant pas soluble à froid, cet allergène est mal exploré car absent des extraits commerciaux. Une réactivité croisée entre collagènes de mammifères est possible
- Dans un travail préliminaire, Verda a identifié 2 protéines IgE-réactives dans le bœuf : une créatine kinase et une beta-énolase .
- Une énolase ayant 65 % d’identité avec celle d’Alternaria (Alt a 11) a aussi été repérée dans le bœuf par l’équipe de Chew avec une méthode de protéomique . Ce même travail a mis à jour d’autres allergènes potentiels (mais non prouvés) dans le bœuf et le porc, dont une transferrine ayant 51 % d’identité avec la conalbumine du blanc d’œuf (Gal d 3).
Allergènes des viandes de volaille
Des homologies entre allergènes de volaille d’espèces différentes sont visibles en immunoblot . La réactivité est souvent détectée pour une albumine (67 kD).
Une large réactivité croisée est observée entre albumines de différents oiseaux (perroquet, perruche, canari, pigeon, poulet, etc…).
Ces albumines sont aussi un composant des sécrétions glandulaires dont les oiseaux se servent pour l’entretien de leurs plumes.
On aura donc une « réactivité croisée » possible entre les plumes et le sérum des oiseaux .
Mais dans la pratique, les patients allergiques aux viandes de volaille ne présentent habituellement pas une allergie pour les plumes .
Récemment, il a été décrit un cas d’allergie au poulet avec réactivité pour une alpha parvalbumine (12 kD) . La patiente était aussi allergique au thon et au saumon, mais sans réactivité pour les béta parvalbumines ; ce qui laisse à penser qu’il n’y a pas de réactivité croisée alpha / béta parvalbumines.
Un autre travail montrait que l’hémoglobine pouvait, elle aussi, représenter une composante allergénique dans l’allergie au poulet .
Ayuso a testé la tropomyosine de poulet en immunoblot : parmi 57 patients avec suspicion d’allergie aux viandes (et TC et/ou CAP positif), un seul était positif in vitro pour la tropomyosine de poulet. On ne peut donc retenir comme significative une réactivité clinique pour le poulet du fait de tropomyosines (ex. chez un allergique aux crustacés).
Viandes de mammifères et viandes de volaille
L’allergie aux viandes de mammifères (bœuf/veau, mouton/agneau, porc, lapin, cheval) ne s’accompagne habituellement pas d’allergie aux viandes de volaille .
Cela s’explique notamment par le peu de réactivité croisée entre albumines aviaires et albumines de mammifères (cf. Albumines).
Cependant, Spitzauer a décrit un cas d’allergie au chien où l’albumine de poulet (ainsi que celles de rat et de souris) se montrait capable d’histamino-libération in vitro .
Et un travail récent a décrit une association où la patiente avait développé une allergie au porc puis au poulet (cf. ci-après).
Viandes de mammifères et phanères de mammifères
La sensibilisation respiratoire à des phanères de mammifères (poils, squames) peut s’accompagner d’une allergie alimentaire pour des viandes de mammifères.
Ce syndrome a été décrit par Drouet et Sabbah sous le vocable de "syndrome porc-chat" car il a été initialement montré que des patients allergiques au chat pouvaient devenir allergiques aux produits dérivés du porc (viande, rognon) .
L’équipe Angevine a démontré que le support de cette association était l’albumine du chat et non Fel d 1. La responsabilité de l’albumine a été retrouvé dans plusieurs études de réactivité croisée . Elle est corroborée aussi parfois par une absence de symptômes si la viande est bien cuite .
La fréquence d’une positivité pour l’albumine de porc chez des patients allergiques au chat a été évaluée entre 4 et 10%, selon le degré de réactivité pour le chat .
De nombreux autres cas ont été décrits et une extension du syndrome a été opérée quand on a remarqué qu’il concernait d’autres viandes que le porc ou pas seulement le porc :
- allergie au porc, veau, agneau, lapin
- allergie au porc, veau, mouton
- allergie au porc suivie d’une anaphylaxie fatale au sanglier
- allergie au bœuf et test cutané positif porc, mouton, etc…
- allergie au cheval et au lapin et tests cutanés natifs pour porc et bœuf (asthme hamster et chat)
Les IgE anti-chat et les IgE anti-porc suivent plus ou moins des évolutions parallèles dans le temps .
Peut-on étendre également le syndrome "porc-chat" à d’autres phanères que le chat ? La réactivité pour le chat s’accompagne parfois d’une réactivité pour le chien .
Plusieurs études ont constaté une réactivité croisée possible entre albumine de chien et albumine de bœuf , de porc ou de cheval (à un moindre degré) .
Des cas d’allergie à différentes viandes, sans sensibilisation au chat, mais avec allergie et/ou tests cutanés à d’autres phanères ont été décrits :
Parfois l’introduction d’un nouvel animal à la maison initie l’allergie à la viande : par exemple le hamster chez des enfants ayant déjà une allergie au chat et/ou au chien .
Le syndrome porc-chat est connu pour se rencontrer principalement chez l’adulte. Une association viande - lait - phanères peut être vue chez l’enfant : ainsi un enfant de 3 ans avec allergie au lait et au veau dont les tests cutanés sont positifs pour le chien et le chat .
Parfois une réactivité pour le chat apparaît après le début de l’allergie au porc. Ces cas n’étant donc pas des "porc-chat" : 2 cas sur les 6 allergies au porc comptabilisées par le CICBAA en 2000 .
D’autres fois l’allergie aux viandes s’établit à distance du contact, pendant l’enfance, avec chat et/ou chien . Et dans cette observation l’éviction des viandes a été suivie d’une chute très importante de l’IgE-réactivité in vitro pour les viandes mais aussi le chat et le chien. A l’issue de 3 ans d’éviction, le patient tolérait porc et agneau bien cuits.
Les patients présentant une rhino-conjonctivite et/ou un asthme aux mammifères dans un cadre professionnel ont-ils un risque accru d’allergie aux viandes ? Cela ne semble pas le cas .
Il a aussi été décrit un asthme professionnel au bœuf (cru), sans allergie alimentaire au bœuf, chez un patient allergique au chien .
Et une allergie professionnelle avec rhino-conjonctivite et asthme au porc, accompagnée d’allergie alimentaire au porc (viande et boudin noir) et allergie au chat . Dans le cas de cette patiente, la sensibilisation provenait de protéines sériques (albumine et gamma globulines).
Par la suite, ce syndrome porc-chat s’est étendu au poulet (et au bœuf) . Une IgE-réactivité était notée pour les albumines de chat, de porc et de poulet, ainsi que pour les hémoglobines de porc, de bœuf et de poulet. Au total, l’allergie au poulet semblait provenir d’une double réactivité croisée : avec l’hémoglobine de porc (contact professionnel) et avec l’albumine de chat (contact domestique).
Cette observation, assez particulière, ne semble pas remettre en cause l’absence d’allergie croisée entre viandes de mammifères et viandes d’oiseaux.
Enfin, il faut noter la fréquence inattendue des patients avec syndrome porc-chat parmi les cas de choc pour la Gelofusine® : 9 patients sur 11 chocs dans une statistique établie par l’équipe Angevine . Cela pose la question d’une éventuelle sensibilisation au collagène, lequel est un composant des viandes.
Viandes de mammifères et laits
Chez l’enfant, une allergie à la viande de bœuf peut être notée dans le cadre d’une allergie aux protéines du lait de vache (APLV) et/ou d’une dermatite atopique (DA). La prévalence irait jusqu’à 20% chez les enfants avec APLV .
Inversement, il a été noté des prévalences de 70-90% d’allergie au lait parmi des patients avec allergie au bœuf .
L’allergène principalement en cause dans cette association bœuf - lait de vache est l’albumine bovine, présente à la fois dans la viande et dans le lait. La tolérance au bœuf suit d’ailleurs plus ou moins l’acquisition de la tolérance au lait .
Et en cas d’APLV persistante, une réactivité pour des albumines de différents mammifères, dont le bœuf, n’est pas rare .
A noter que cette réactivité aux albumines peut inclure aussi des phanères animales : chien ou cheval .
Ayuso estime que les immunoglobulines bovines ont aussi un rôle dans l’association bœuf-lait .
Quelques paramètres vont jouer sur la coïncidence ou non, chez le même patient, d’une allergie au bœuf et au lait :
- chez l’adulte, on relèvera la rareté des allergies au lait chez les patients allergiques au bœuf et/ou à d’autres viandes de mammifères . Parfois la sensibilisation à l’albumine bovine positive le test cutané lait de vache, cette réactivité restant infra-clinique .
- chez l’enfant, on peut avoir la même réactivité sans APLV mais des séries ont aussi été publiées où APLV et allergie au bœuf étaient fréquemment simultanées :
- Il est probable que le recrutement des enfants dans ces séries a influencé les résultats. Notamment la présence d’une dermatite atopique.
- l’expression clinique est dépendante de la cuisson des viandes, comme le montre le cas d’un jeune adulte, qui tolérait le LV, comme la viande de bœuf, uniquement après cuisson soigneuse . De même dans une observation pédiatrique où la réactivité semblait restreinte à la bovalbumine et à l’IgG, l’enfant était positif en TC pour le lait tout en tolérant cliniquement celui-ci .
Fiocchi suggère de contrôler la tolérance au bœuf chez les enfants de moins de 3 ans avec un TPO avant de décider une exclusion sur la base des tests cutanés et résultats in vitro . Il estime, par ailleurs, qu’il existe 2 sensibilisations concernant le bœuf : chez l’enfant elle est concentrée sur l’albumine bovine avec acquisition de tolérance dans la plupart des cas ; chez l’adulte d’autres allergènes (Immunoglobulines et/ou myoglobine) sont aussi en jeu et l’allergie a plus de chance d’être fixée .
Viandes de volaille et œufs
Il est rare de trouver dans les cas cliniques publiés une allergie simultanée volaille-œufs.
Si des tests cutanés positifs pour l’œuf sont parfois relevés chez des sujets allergiques à la viande de volaille , ces patients tolèrent l’œuf quasiment toujours .
De même, la présence d’un test cutané positif pour le poulet, par exemple, chez un patient allergique à l’œuf a une faible relevance clinique (< 5 % selon Martorell ).
Sachant que la cuisson poussée des viandes de volaille tend à réduire plus l’allergénicité de l’aliment que la cuisson de l’œuf, on s’attendrait à une réactivité plus fréquente pour l’œuf chez des sujets ne tolérant pas la viande de volaille.
Les patients tolèrent-ils les œufs parce qu’ils ont acquis dès l’enfance cette tolérance ? Hormis un cas isolé où l’histoire clinique relevait bien d’allergie puis tolérance pour l’œuf , on manque de données anamnestiques publiées pour valider cette hypothèse.
L’allergie aux abats et autres produits de boucherie
Dans la base de données CICBAA en 2002, quelques cas concernaient des abats : ainsi la fréquence de ce type d’allergie parmi les allergies alimentaires était de 0,1 % chez l’enfant et de 2,9 % au-delà de l’âge de 15 ans .
L’aliment concerné au premier chef est le rognon de porc.
Des accidents sévères sont même souvent rencontrés avec le rognon puisque sur 900 cas déclarés au Réseau National d’Allergovigilance (mai 2010), 15 étaient dus au rognon.
Comparativement il n’était relevé que 2 cas d’allergie sévère à la viande de porc et aucun pour le bœuf ou le mouton.
Dans cette compilation du Réseau, on notait aussi :
- un cas d’allergie au rognon avec allergie à la viande de porc.
- un cas avec du boudin s’accompagnant d’une réactivité infra-clinique pour la viande de porc. Le patient était allergique au chat
- un cas d’allergie au rognon avec histoire de réactions au pâté de tête
Ainsi, la plupart des cas colligés par le Réseau révélaient une allergie isolée pour le rognon.
Ces faits montrent que même si on ne connaît pas les allergènes qui conduisent à l’allergie au rognon, il est probable qu’ils sont en partie différents de ceux de la viande de porc .
Par ailleurs :
- Lepp a décrit 2 cas d’anaphylaxie aux rognons sans allergie à la viande de porc ni au chat .
- Llaster a rapporté un cas d’allergie aux rognons et aux tripes (de porc et de mouton) sans allergie à la viande de porc
- Parmi les 10 patients avec allergie aux rognons présentés par Touraine , 3 réagissaient à la viande de porc en test cutané.
- Morisset a décrit un cas d’allergie à plusieurs abats (rognons, andouillette, langue de bœuf) chez qui l’allergie à la viande de porc se limitait au porc cru .
Deux autres caractéristiques concernent l’allergie au rognon de porc : cette allergie touche des adultes souvent âgés de plus de 40 ans ; et des facteurs adjuvants (alcool, effort, béta-bloquants, IEC) ne sont pas rares.
Viandes : stabilité à la chaleur et à la digestion
Viandes de mammifères
Résistance à la chaleur
Il est clair que l’allergénicité des viandes est très souvent réduite par la cuisson. Du moins par une cuisson suffisante . Le bœuf est la viande la plus souvent consommée crue ou partiellement cuite (comme certaines pièces de mouton), si l’on exclut les viandes séchées et les salaisons (ex. porc).
Ayuso montre une négativation des blots viande de bœuf dans environ 2/3 des cas après cuisson .
Werfel relève 3 TPODA négatifs après cuisson (2 h à 85 °C) parmi 11 patients allergiques au bœuf cru. . Fiocchi estime que la cuisson industrielle est plus efficace que la cuisson domestique .
C’est principalement le bœuf qui a été étudié et l’allergène principal de cette viande, l’albumine bovine.
Kanny note qu’un TPODA à l’albumine bovine devient négatif après chauffage 10 min à 100°C .
Fiocchi trouve encore 4 TPODA positifs sur 9 après un chauffage plus bref de l’albumine bovine (5 min à 100°C) .
L’IgE-réactivité de l’albumine bovine est maintenue pendant 15 min à 95°C ; et, singulièrement, l’albumine bovine n’est stable que 10 min à 80 °C quand la cuisson n’est pas appliquée à la protéine pure mais à la viande elle-même.
En immunoblot, la bande de 67 kD disparaît bien après cuisson de la viande et Restani montre qu’il ne s’agit pas d’un artefact (la technique passe elle-même par un chauffage à 100 °C 5 min) .
L’effet du chauffage sur l’autre allergène important de la viande de bœuf, l’IgG, a été moins étudié. Les globulines semblent moins stables que l’albumine bovine . La myoglobine est thermorésistante : son rôle dans l’allergie au bœuf après cuisson a été évoqué mais aussi réfuté .
A contrario on connaît des observations où le patient ne réagit qu’à la viande cuite .
On a peu de données sur les viandes d’autres mammifères, mais de nombreux cas cliniques publiés dans la littérature montrent une meilleure tolérance si la viande est bien cuite .
Comme pour d’autres aliments consommés cuits, les allergènes des viandes une fois cuites ne sont pas superposables aux allergènes identifiés sur des extraits de viande crue. Des bandes disparaissent en blot, tant dans le porc que dans le bœuf . Cette réorganisation des protéines du fait de la chaleur peut conduire à des espèces protéiques nouvelles agissant comme des néo-allergènes.
Résistance à la digestion
C’est avant tout l’albumine bovine qui a été étudiée.
Celle-ci est décomposée en milieu gastrique très rapidement (< 1 min ), mais des fragments subsistent qui restent IgE-réactifs même après 1 h en milieu gastrique .
La bonne digestibilité de l’albumine bovine est cependant dépendante du pH : à pH4 celle-ci n’est pas digérée complètement en 90 min . Il faut donc tenir compte de l’état physiologique et de la prise d’anti-H par le patient.
Fiocchi note une bonne efficacité de la digestion pepsique sur les tests cutanés pour la viande de bœuf : 8 tests/12 se négativent après 5 min de digestion et 10/12 après 2 h . Ces résultats sont reproduits avec la viande de mouton .
Volailles : stabilité à la chaleur et à la digestion
Résistance à la chaleur
- le poulet voit son IgE-réactivité réduite de 88 % après 30 min à 90°
- près de la moitié des patients voient leur blot poulet se négativer après cuisson (20 min, 140° C). Cependant la chaleur modifie aussi les blots et des bandes IgE-réactives nouvelles peuvent apparaître après cuisson du poulet.
- dans une série de 202 jeunes enfants la prévalence pour un TC positif passait de 17% avant à 11% après cuisson pour le poulet, de 29% à 10% pour la dinde et de 15% à 7% pour le canard .
- la persistance d’un prick positif avec la viande de poulet cuite est cependant notée, en particulier chez l’adulte
Résistance à la digestion
La digestibilité des viandes d’oiseaux n’a pas été étudiée, semble-t-il.
Viandes : l’effet de processus techno-alimentaires
Fiocchi a testé en TPODA la viande de bœuf homogénéisée ou lyophilisée chez 10 patients réagissant au bœuf même cuit : aucun TPODA positif n’était noté avec ces produits . Ces deux procédés font appel à des phases comportant un chauffage important (100°C et 120°C).
Allergie respiratoire aux viandes
Des cas d’allergie professionnelle aux viandes avec asthme et/ou rhino-conjonctivite ont été décrits chez des sujets travaillant dans des abattoirs ou des ateliers de fabrication .
Ils s’accompagnent parfois d’une allergie alimentaire aux viandes ou aux produits de boucherie , allergie qui peut s’avérer persister après l’arrêt de l’exposition professionnelle .
Allergie aux viandes par "allergènes" caché
Le produit allergisant peut se trouver caché dans un aliment d’origine carnée : on a noté des cas avec du blanc d’œuf , du soja , des larves d’Anisakis . On connaît aussi des réactions dues aux moisissures : c’est le cas pour la peau du saucisson .
Inversement des produits de boucherie/charcuterie peuvent receler des viandes de façon inattendue : par exemple des viandes de volailles dans des saucisses de porc ou dans du foie gras , ou du bœuf dans un hamburger sensé contenir porc et poulet .
A noter que des médicaments et dispositifs médicaux peuvent contenir des protéines d’origine animale .
Diagnostic des allergies aux viandes
Peu de travaux ont été consacrés spécifiquement à cette question. On peut relever cependant :
- que Fiocchi conclut à un manque de spécificité avec le prick natif pour le bœuf chez des enfants avec eczéma atopique et testés en TPODA
- que Werfel ne trouve que 11 TPODA positifs pour le bœuf (et 8 si ce dernier est cuit) parmi 66 enfants avec APLV et TC positif pour le bœuf
- que, de même, Moneret-Vautrin rapporte, dans son expérience, une fréquence de 7% à 29% pour différentes volailles en prick natif chez des enfants avec allergie à l’œuf
Les CAP ne paraissent pas non plus très performants . Et ni les TC ni les CAP ne sont corrélés aux doses réactogènes .
Un TPO est donc conseillé par certains auteurs .
Viandes de mammifères et CCD
L’albumine n’est pas glycosylée.
Les gamma globulines le sont. Cependant il n’a pas été montré jusqu’à présent de réactivité croisée entre les chaînes glucidiques des protéines carnées et celles des végétaux ou des venins d’hyménoptères qui sont à l’origine d’IgE anti-CCD (classiques) du sérum.
Dans un travail visant à retirer les IgE anti-CCD du sérum par immuno-capture, l’absence d’IgE-réactivité glucidique dans la viande de bœuf a pu être montré .
Par contre, les viandes de mammifères entre dans le cadre du "syndrome alpha-Gal" où une réactivité croisée entre épitopes glucidiques a bien lieu, mais restreinte à des croisements entre protéines de mammifères (voir : Les CCD)
Allergie à des viandes, autres que les volailles ou les mammifères
Grenouille
On connaissait des cas d’allergie professionnelle, cutanée et/ou respiratoire, aux grenouilles (classe des batraciens). Des réactions alimentaires à l’ingestion de cuisses de grenouille ont été récemment rapportées.
- Un cas adulte et un cas pédiatrique , ce dernier avec aussi une allergie au poisson.
- Les allergènes en cause sont des parvalbumines α et/ou β présentes dans la chair des grenouilles (Rana macrodon, Rana esculenta). Dans le cas de l’enfant décrit par Romano la réactivité était limitée à la β parvalbumine.
- les comparaisons de séquence avec la β parvalbumine de morue Gad m 1 montrent une identité de 61-64% pour la β parvalbumine de grenouille Ran m 1, et de 49-51% pour l’ α parvalbumine de grenouille Ran m 2 .
- La réactivité croisée poisson-grenouille a été étudiée par Hilger montrant que, chez des sujets allergiques au poisson, nGad c 1, la β parvalbumine de morue, inhibait les parvalbumines α et/ou β de grenouille.
Hilger estime donc que l’on peut rencontrer deux situations différentes : soit une sensibilisation directe à la grenouille (avec réactivité α et/ou β parvalbumine), soit une allergie à la grenouille induite par le poisson (avec réactivité préférentielle pour la β parvalbumine).
Kangourou
On a récemment décrit des cas d’allergie au kangourou (classe des marsupiaux).