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Réactivités croisées entre Fabacées
dimanche 15 juin 2008, par
La question d’une allergie croisée entre différentes graines de Fabacées est justifiée par la fréquence avec laquelle des tests cutanés sont trouvés positifs chez un même patient pour différentes Fabacées, constatation relayée par les tests in vitro de réactivité croisée.
Cela peut correspondre à au moins 3 cadres de sensibilisation. Il ne sera envisagé ici que celui où, apparemment, le rôle des PR-10 (bouleau) et des LTP ne semble pas prépondérant ou n’a pas été démontré.
Les tableaux ci-dessous dressent un aperçu épidémiologique des co-réactivités aux Fabacées selon le motif de recrutement des patients ? Il va de soi que l’âge (ex. pollinose ou non) et l’origine géographique des patients sont des paramètres importants à considérer par ailleurs.
Associations cliniques et/ou immunologiques entre Fabacées
(hors contexte bouleau ou LTP) :
1- Recrutement = arachide
HC+ = histoire clinique positive / TC+ = test cutané positif / CAP+ = test in vitro CAP positif
TPO(DA) = test de provocation par voie orale (en double aveugle) / TPL = test de provocation labiale
2- Recrutement = lupin
3- Recrutement = soja
4- Recrutement = Fabacées diverses
Le travail classique de Bernhisel-Broadbent avait montré qu’il fallait prendre garde aux nombreux tests cutanés positifs non confirmés en TPODA . Ce travail venait notamment en réponse à des résultats antérieurs qui avaient généré une tendance à exclure du régime des Fabacées nutritionellement importantes (haricots, pois, etc..).
L’ensemble des études effectuées depuis la publication de Bernhisel-Broadbent a solidement confirmé le grand excès des tests diagnostiques positifs (cutanés et sériques) sans relevance clinique (cf. les tableaux ci-dessus).
Quelle est l’importance relative des réactions cliniques pour telle ou telle Fabacée quand un patient est allergique à une Fabacée ?
En prenant une moyenne des prévalences des différentes cohortes publiées on peut en avoir une idée (très approximative) :
Dans ce cas :
- l’allergie au lupin est rencontrée chez 23% des patients,
- celle pour le soja chez 3%,
- celle pour le pois chez 2% et
- celle pour les lentilles entre 1 et 2%.
- A noter que dans la majorité des cas il s’agissait d’allergies à l’arachide chez l’enfant, hors contrées méditerranéennes.
Par comparaison, si une pollinose au bouleau est présente, ces proportions pourraient être différentes : une étude a indiqué un fréquence de 35% pour le lupin (TPO) et de 33% pour le pois et 29% pour le soja (sans contrôle par TPO) .
Chez des enfants pour lesquels le diagnostic d’allergie à l’arachide a été écarté, la prévalence d’une allergie au soja était très faible, 0,6%, dans une étude de Rancé en France .
L’allergie à l’arachide augmente donc le risque d’observer une allergie au soja, quelqu’en soit le mécanisme. Mais une allergie au soja peut très bien s’établir par elle-même, indépendamment de l’arachide .
Les relations entre pois et arachide sont souvent à l’avantage de l’arachide mais il a été observé des cas où l’allergie au pois avait débuté avant celle pour l’arachide .
La relation arachide-lupin est plus complexe : dans la plupart des cas l’arachide est capable d’inhiber l’IgE-réactivité du lupin,
Dans une étude portant sur l’allergie aux lentilles cette réactivité croisée n’était pas observée .
Il faut, de plus, envisager le rôle d’une pollinose au bouleau, de sorte qu’une réactivité simultanée au lupin et à l’arachide peut résulter d’une même sensibilisation à des protéines PR-10 . (cf. Fabacées et bouleau).
Le nombre limité d’observations d’allergie au lupin rend délicate l’interprétation des associations, mais quand le motif d’exploration est une allergie au lupin la relation avec l’arachide semble rare : dans 7 cas d’allergie au lupin il n’était relevé qu’un seul cas d’allergie à l’arachide (cf. tableaux ci-dessus).
Si une pollinose au bouleau est présente également on peut trouver une plus forte proportion d’allergiques à l’arachide
Elle semble nettement associée à l’allergie à l’arachide, laquelle est généralement apparue la première.
Peu de différence, ici, entre présence ou absence de pollinose au bouleau : dans les 2 cas l’allergie à l’arachide est très fréquente
– Allergie aux pois, pois chiche, lentille, haricot :
On manque de données détaillées sur le plan épidémiologique mais ces légumineuses ont une allergénicité certaine dans plusieurs régions du monde du fait d’habitudes alimentaires locales (ex. sub-continent indien).
En Espagne, l’ensemble lentille + pois + pois chiche représente la 4ème cause d’allergies alimentaires de l’enfant.
In vitro, des réactivités croisées entre ces 3 Fabacées sont presque constamment retrouvées.
La réactivité croisée entre le pois et d’autres Fabacées est possible du fait de l’homologie entre Pis s 1 et d’autres vicilines (Ara h 1 dans l’arachide, une viciline dans la fève, etc..) et particulièrement celle de lentille, Len c 1 (env. 90% d’identité avec Pis s 1). Cela a reçu confirmation in vitro .
La réalité d’un lien immunologique entre Fabacées a récemment été démontrée à l’aide de tests cellulaires par Bjerremann Jensen .
Des basophiles naïfs ont été passivement activés avec le sérum de patients allergiques à l’arachide, puis ces basophiles ont été mis en contact avec des extraits de légumineuses : le lupin, le soja et le pois parvenaient à dégranuler les basophiles, d’autres Fabacées également mais à un moindre degré.
On retrouve bien, pour ces patients résidant hors des régions méditerranéennes, les 3 principales Fabacées associées à une allergie à l’arachide et on comprend d’autant mieux la fréquence élevée des tests cutanés observés chez ces patients.
Il ne s’agit donc pas que de réactivité croisée in vitro (et de CCD ..).
Pourquoi peu de patients réagissent cliniquement au pois bien qu’ayant un TC positif ? C’est une question qui mériterait d’être élucidée.
En attendant, il faut considérer avec tact et mesure les résultats publiés de réactivité croisée : dans le cas des Fabacées il est encore plus clair que réactivité croisée in vitro ne signifie pas mécaniquement allergie croisée pour le patient.