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Les Fabacées : généralités
Saturday 3 May 2008, by
Les Fabacées regroupent plus de 20000 espèces différentes, parmi lesquelles des plantes de toute première importance sur le plan allergologique, comme l’arachide, le soja, le lupin, les lentilles, …
Les usages des Fabacées sont multiples :
- pâtures et fourrages : trèfles, sainfoins, mélilots, luzerne, ...
- alimentation animale : protéagineux et tourteaux : pois, féverole, lupin, soja,…
- nutrition humaine : soja et tous les féculents que sont les pois, les haricots, les lentilles et qui représentent une source essentielle de protéines dans beaucoup de pays
- huiles alimentaires : arachide, soja
- produits dérivés : à usage traditionnel ou diététique (ex. tofu) ou techno-alimentaire (farines, extrudés, isolats, …)
- production de gommes : guar, adragante, caroube
- sans compter l’arachide grillée (ou bouillie dans certains pays)
Sur le plan botanique, l’arachide se distingue par la croissance sous-terraine de ses gousses et par son caractère nettement oléagineux au sein des graines de Fabacées.
Le soja est, de ce point de vue, dans une position intermédiaire : ni une graine protéagineuse comme les pois, haricots, etc.. ni un oléagineux comme l’arachide.
Il n’est pas exclu que cette distinction révèle une composante non encore bien étudiée, à savoir l’influence des lipides sur l’allergénicité des protéines au sein d’un produit allergisant .
En ce qui concerne les Fabacées, on a une gradation qui pourrait concorder avec cette hypothèse, l’allergénicité augmentant depuis les pois, haricots, etc.. jusqu’à l’arachide en passant par le soja.
De nombreuses graines oléagineuses provenant d’autres familles botaniques montrent une allergénicité prononcée se révélant d’autant mieux que la graine elle-même est consommée : par exemple le sésame ou la noix, par opposition au colza, au tournesol, etc.. dont on consomme plutôt un dérivé pratiquement dénué de protéines, l’huile.
Les dénominations anglo-saxonnes des Fabacées peuvent générer des confusions : le terme de « legumes », par exemple qui désigne en fait les Légumineuses, c’est-à-dire les Fabacées en général.
Le terme de « pulses » se rapporte aux graines protéagineuses entrant dans l’alimentation comme les pois, les haricots, etc…
Par ailleurs, un grand nombre de graines comportent « bean » ou « pea » ou « gram » dans leur nom. Les équivalences entre anglais et français ne sont pas constantes et, là où « bean » représente une notion de graine en général, on peut trouver « pois », « fève », « haricot », etc.. en français. En dehors des Fabacées on a aussi des équivalences inconstantes comme « bean » pour les grains (café, ricin) ou les fèves (cacao).
Le tableau ci-dessous liste un certain nombre de graines de Fabacées avec leurs dénominations latines, françaises et anglo-saxonnes. Il ne saurait être exhaustif du fait de la multitude des appellations locales que l’usage ancien et populaire de ces graines a généré. En Inde, par exemple, on dénomme de nombreuses graines de Fabacées avec le mot « dal » en suffixe .
Espèce | Français | Anglais | avec « bean » | avec « pea » |
---|---|---|---|---|
Arachis hypogea | arachide, cacahuète | peanut | ||
Cajanus cajan | pois d’Angola, ambrevade | red gram | pigeon pea | |
Canavalia ensiformis | jack bean | |||
Canavalia gladiata | pois sabre | sword bean | ||
Ceratonia siliqua | caroube | carob | algarroba bean | |
Cicer arietinum | pois chiche | chickpea | ||
Dipteryx odorata | fève de Tonka | tonka bean | ||
Glycine max | soja | soya bean, soybean | ||
Lablab purpureus | dolique d’Egypte, pois nourrice | hyacinth bean | ||
Lathyrus sativus | gesse commune | vetchling | indian pea, grass pea | |
Lens culinaris | lentille | lentil | ||
Lupinus spp. | lupin | lupine | ||
Macrotyloma uniflorum | haricot de kulthi | horse gram | kulthi bean | |
Medicago sativa | luzerne | alfalfa | ||
Phaseolus coccineus | haricot d’Espagne | runner bean | ||
Phaseolus lunatus | haricot du Cap / pois de sept ans | lima bean | ||
Phaseolus vulgaris | haricot, haricot vert, flageolet, haricot pinto, coco rose |
kidney bean, snap bean, green bean, string bean, butter bean, flageolet bean, French bean, navy bean, pinto bean | ||
Phaseolus vulgaris (nanus group) | ||||
Physostigma venenosum | fève de calabar | calabar bean | ||
Pisum sativum | pois, petit pois, pois cassé | green pea, garden pea, split pea | ||
Pisum sativum arvense | pois fourrager | field pea | ||
Pisum sativum macrocarpon | pois mange-tout | snow pea, snap pea | ||
Psophocarpus tetragonolobus | pois ailé / pois asperge | winged bean | ||
Tamarindus indica | tamarin | tamarind | ||
Trigonella foenum-graecum | fenugrec, trigonelle | fenugreek | ||
Vicia ervilia | ers, lentille ers | ervil, lentil vetch, bitter vetch | ||
Vicia faba | fève | broad bean, fava bean | ||
Vicia sativa | vesce cultivée | common vetch | ||
Vigna aconitifolia | haricot papillon | moth bean | ||
Vigna angularis | haricot anguleux | adzuki bean | ||
Vigna mungo | haricot mung(o) | blackgram | urad bean | |
Vigna radiata | haricot mung(o) à grain vert/jaune | green/golden gram | mung bean | |
Vigna umbellata | haricot (grain dee) riz | rice bean | ||
Vigna unguiculata cylindrica | dolique des vaches, dolique cajun | catjang bean | cowpea | |
Vigna unguiculata sesquipedalis | dolique asperge, haricot kilomètre | yardlong bean, asparagus bean | ||
Vigna unguiculata unguiculata | dolique à œil noir, niébé | black-eye pea, common cowpea |
Les protéines IgE-réactives des Fabacées
Les graines de Fabacées sont souvent très riches en protéines, ce qui justifie leur importance alimentaire. Parmi ces protéines on trouve principalement des protéines dites de stockage, c’est-à-dire accumulées en vue de la germination et de la croissance de la plantule.
Ces protéines de stockage sont, notamment, des vicilines et des légumines. Bien que ces 2 sortes de protéines soient rangées dans la super-famille des cupines (cf. Les protéines des graines), il ne faut pas confondre vicilines et légumines car ces protéines ne croisent pas les unes avec les autres.
Aussi, le terme de « cupines » employé par certains peut être trompeur pour désigner tel ou tel allergène.
On trouve aussi des viclines et des légumines dans des graines d’autres familles botaniques : le sésame, les noix, les noisettes, etc..
Des protéines plus petites, sédimentant en « 2S » au lieu de 7S ou 11S comme les vicilines et légumines, sont trouvées dans les graines de Fabacées. Elles ont un rôle souvent mixte, à la fois de stockage et de défense .
On rencontre des équivalents de 2S albumines dans des graines d’autres familles botaniques : le sésame, le tournesol, la moutarde, la noix de cajou, etc…
Il n’est pas surprenant de trouver des LTP (lipid transfer proteins) dans les graines de Fabacées, ces protéines étant rencontrées dans la plupart des espèces végétales.
En revanche, la présence de protéines PR-10, Bet v 1-like, dans plusieurs graines de Fabacées (arachide, soja, etc..) crée une opportunité supplémentaire de réactivité croisée.
En plus des associations immunologiques et/ou cliniques entre graines de Fabacées, on peut donc observer des tableaux associant Fabacées et bouleau, Fabacées et fruits des Rosacées, ou encore Fabacées, bouleau et Rosacées.
On comprendra que la dissection des sensibilisations responsables de la réactivité finalement présente chez le patient soit parfois difficile à opérer.
Ces différents cadres étiologiques sont discutés ailleurs (cf. Fabacées réactions croisées)
Fabacées : monographies
Sont envisagés séparément :
Sont décrits ci-après :
- haricots
- lentilles
- pois
- pois chiche
- pousses de soja
- Fabacées diverses
- fenugrec
- fève et vesces
- gesses
Dans l’ensemble, ces graines génèrent assez rarement des réactions sévères en France : sur 900 déclarations au Réseau d’Allergo-Vigilance en mai 2010, 8 concernaient les lentilles, 2 les pois, 1 la fève, 1 le haricot vert et 1 le fenugrec. Ces chiffres sont à comparer avec ceux du soja (23 cas), du lupin (33) et, bien sûr, de l’arachide (111).
Haricots
L’espèce Phaseolus vulgaris comporte de multiples variétés et sous-espèces donnant une égale multitude de produits : haricots blancs, rouges, flageolets, cocos, haricots verts, mange-tout, etc..
Malgré leur large consommation, ces différents haricots semblent ne générer que rarement des réactions allergiques dans de nombreux pays d’Europe et en Amérique du nord.
On connaît plutôt des cas d’allergie par voie respiratoire : haricots verts crus ou vapeurs de cuisson de haricots blancs .
Ce n’est pas que les graines de haricot soient dépourvues de protéines appartenant à des familles d’allergènes : on trouve bien une PR-10, une profiline , une chitinase de classe 1 , une thaumatine-like , ainsi que la phaséoline qui est une viciline glycosylée présente en grande quantité dans les graines.
L’absence d’allergie alimentaire associée peut se comprendre dans le cas du haricot vert par une fragilité (ou une dilution ?) des allergènes. Ainsi Sanchez Monge a noté la disparition de l’IgE-réactivité de la chitinase après cuisson .
Malgré tout, des blots réalisés avec les vapeurs de cuisson étaient positifs au moins pour une bande (38 kD) , faisant penser qu’un allergène de haricot, au moins, est thermostable.
Compte tenu de cette thermolabilité partielle des allergènes de haricot, il a été suggéré d’utiliser pour les tests cutanés des extraits cuits plutôt que crus, comme le sont les extraits commerciaux : la spécificité des tests était alors améliorée .
Les recherches en technologie alimentaire ne cessant d’inventer de nouveaux procédés, les protéines de haricot pourraient venir allonger la liste des protéines de blé, de soja, de lupin, etc.., utilisées dans des préparations industrielles.
Un des buts de ces ajouts dans les aliments manufacturés étant d’obtenir des réseaux moléculaires (gels, élasticité, cohésion, etc..), le recours à des « colles » comme la transglutaminase est envisagé .
Le résultat sur le plan immunologique de ces transformations moléculaires est en grande partie inconnu , mais, s’agissant du haricot, une étude a montré une baisse de la digestibilité de la phaséoline traitée par la transglutaminase .
Lentilles
Les lentilles représentent une cause non négligeable d’allergie alimentaire dans certains pays : ainsi, en Espagne, elles sont la cause de 10% des allergies alimentaires de l’enfant.
Ailleurs en Europe, les cas d’allergie alimentaire aux lentilles sont rares. La responsabilité des habitudes alimentaires est souvent avancée pour expliquer ces écarts car, contrairement à d’autres légumineuses, l’IgE-réactivité des lentilles n’est pas affectée par la cuisson .
On a d’ailleurs décrit des réactions au contact des vapeurs de cuisson .
On connaît quelques allergènes :
- Len c 1 est une viciline glycosylée, moyennement homologue avec Ara h 1 (50% d’identité) et positive chez la plupart des patients (Espagne) . Cet allergène pourrait être responsables des réactivités croisées avec l’arachide et le pois chiche
- Len c 2 est une protéine de 66kD, homologue d’une « SBP65 » trouvée dans le pois. Ces 2 protéines ont la particularité d’être biotinylées naturellement. Il n’a pas été étudié si cette présence de biotine pouvait interférer dans certains tests in vitro utilisant un complexe de détection à base de streptavidine (ex. peroxydase-streptavidine) : on pourrait alors avoir une liaison directe à Len c 2 sans passer par la chaîne réactionnelle normale allergène – IgE du patient – anti-IgE biotinylée.
Pois
Les différentes variétés de pois (petit pois, pois cassés, pois gourmands, etc..) appartiennent à une même espèce de Fabacée, Pisum sativum.
Les cas publiés d’allergie aux pois sont rares. Peut-être est-ce en relation avec la thermolabilité de certains des allergènes : dans une étude d’enfants Danois aucun des 10 TPO positifs avec le pois cru n’était positif avec le pois cuit .
Il est probable que cela traduit une réactivité liée au bouleau chez ces enfants et une PR-10 a été repérée dans le pois au moins avec un anticorps anti-Bet v 1, faute de preuve directe d’IgE-réactivité .
Mais d’autres protéines sont IgE-réactives et le peu de réactions cliniques avec le pois mériterait de trouver une explication à travers des travaux complémentaires.
On connaît une profiline, une viciline (Pis s 1) et une conviciline (Pis s 2), cette dernière appartenant à une catégorie proche des vicilines. Toutes ces protéines ont montré leur capacité à se lier aux IgE des patients.
Le pois est porteur de réactivité CCD également .
Pois chiche
Les études concernant le pois chiche ont principalement été conduites dans des pays où la consommation de cette Fabacée est importante (ex. Inde, Espagne).
Si les cas d’allergie alimentaires y sont fréquents, avec volontiers une allergie à d’autres légumineuses , on a aussi décrit des cas d’asthme par inhalation de vapeurs de cuisson de pois chiches . De fait, l’IgE-réactivité du pois chiche résiste bien à la cuisson (ébullition) .
On connaît très mal les protéines IgE-réactives du pois chiche :
- une viciline est probable car Len c 1 (lentille) est capable d’inhiber la réactivité pour un extrait de pois chiche
- une lectine pourrait être IgE-réactive : cette protéine de 20-23 kD est parfois présentée comme une 2S albumine mais, si cela est vrai en vitesse de sédimentation, cette protéine n’est pas un homologue des 2S classiques comme Ara h 2 (arachide) ou Ber e 1 (noix du Brésil). Elle est en fait affiliée aux protéines « PA2 » qui possèdent une activité lectine de type hémopexine. On en trouve également dans le pois, le haricot mungo et la vesce commune, par exemple .
Une « allergie croisée » entre pois chiche et latex a été invoquée chez un enfant atteint de spina bifida et présentant un syndrome oral avec les pois chiches .
En fait, la preuve d’une réactivité croisée n’a pas été apportée dans ce travail, le pois chiche s’avérant ne pouvoir inhiber significativement le latex in vitro.
Pousses de soja
Contrairement aux apparences, les pousses de soja ne proviennent pas du vrai soja (Glycine max) mais d’une autre Fabacée, Vigna radiata.
A noter qu’il est possible de produire des « pousses » avec d’autres Fabacées, comme le vrai soja ou la luzerne, et que leur allergénicité est très probable .
D’ailleurs l’espèce Vigna mungo, très proche de Vigna radiata et consommée non germée en Inde (« urad dal »), est à l’origine de réactions allergiques .
Les anglo-saxons parlent de « mungbean seedlings », ce qui est plus conforme au nom de la graine qui, germée, donne les pousses de soja : le haricot mungo.
La réactivité aux pousses de soja est très souvent associée à une allergie au vrai soja car l’allergène principal de Vigna radiata, Vig r 1, est proche de Gly m 4, la PR-10 trouvée dans le soja (74% d’identité).
En fait, ces deux protéines ont une IgE-réactivité induite par une même sensibilisation, à savoir la pollinose au bouleau. Cela survient alors que l’homologie entre Vig r 1 et Bet v 1 est somme toute modérée (43%), ce qui rappelle les limites de la prédiction bio-informatique des réactivités croisées.
Vig r 1 n’est pas la seule protéine IgE-réactive dans les pousses de soja, même si sa concentration augmente beaucoup au moment de la germination.
On peut s’attendre à trouver des protéines similaires à celles d’autres graines de Fabacées. On a identifié une profiline et Mittag remarque une bande de 35kD positive chez la plupart des patients .
On a caractérisé aussi une LTP et une viciline sans que la preuve d’une IgE-réactivité n’ait été étudiée jusqu’à présent pour ces protéines.
Vigna radiata contient, comme d’autres Fabacées, des facteurs anti-nutritionnels qui sont inactivés par la chaleur et qui justifient donc une cuisson avant consommation (lectines, inhibiteurs de trypsine,..).
Bien que les protéines PR-10 soient réputées ne pas résister à la chaleur, les conditions environnantes dans le produit chauffé doivent jouer un rôle car, s’agissant des pousses de soja, une étude a montré que plus de la moitié des patients positifs en TC avant cuisson le restaient après cuisson .
Fabacées diverses
Fenugrec
Le fenugrec est utilisé comme épice (ex. curry). Il est à l’origine de rares observations d’allergie alimentaire où la responsabilité d’une sensibilisation à l’arachide est évoquée .
Le fenugrec a aussi provoqué des réactions par inhalation ou large contact cutané .
Fève et vesces
Ces graines proviennent de plantes du genre Vicia.
La fève, Vicia faba, a très rarement fait l’objet d’observations publiées d’allergie alimentaire. Dans un cas il s’agissait de farine de fève en tant qu’ingrédient dans du pain industriel . Dans un autre cas, la patiente avait présenté une réaction anaphylactique après ingestion de fèves fraîches et bouillies . Un asthme professionnel a été décrit aussi (cf. Bessot ).
Normalement les autres vesces sont des graines données aux animaux (Vicia sativa, Vicia ervilla).
Gesses
Les gesses sont également des plantes destinées aux animaux. La gesse commune, Lathyrus sativus, contient un agent neurotoxique qui peut aboutir à un trouble nommé lathyrisme.
Il a été observé des cas de rhinite/asthme professionnel avec la farine de gesse commune dans un contexte très particulier : la fabrique de lames de parquets .